+ Chemins de la puissance, les États-Unis depuis 1918

Note Cette annexe historique ne prend pas en compte la présidence de Trump.

En 1796, Georges Washington, le premier président des États-Unis, déclarait : « La grande règle vis-à-vis des nations étrangères est, en étendant nos relations commerciales, de n'avoir avec elles qu'aussi peu de liens politiques qu'il est possible ». Ce principe qui préfigurait la tradition isolationniste américaine, la volonté de rester à l’écart des affaires, a maintes fois été contredit, et en premier lieu par l’intervention américaine dans les guerres mondiales.

La question du chemin des États-Unis vers la puissance se pose donc, sa trajectoire singulière, le rythme et les discontinuités que le pays a connu pour parvenir à la puissance sans partage de 1991. Depuis la fin de la première guerre mondiale, comment caractériser l’évolution de la puissance des États-Unis ? Quelles ont été les étapes de la domination politique et économique ? On verra que la trajectoire n’a été ni totalement continue, ni sans heurts.

En premier lieu, on étudiera la montée en puissance des États-Unis de 1918 à 1947, entre isolationnisme et interventionnisme. Ensuite, nous analyserons comment les États-Unis, dans le contexte de la guerre froide, sont devenus une superpuissance exerçant une domination contestée sur le monde. Enfin, nous verrons comment les États-Unis à partir de 1991 accèdent au statut d’hyperpuissance, mais sont sur la défensive.

#1. La montée en puissance des États-Unis (1918-1947)

#A. Entre isolationnisme et interventionnisme

#a) L’importance de la doctrine Monroe

Entre 1918 et 1947, la politique étrangère des États-Unis alterne entre isolationnisme et interventionnisme. L’isolationnisme, le fait de délibérément rester à l’écart des affaires des autres pays est une tradition politique américaine dont on doit la formulation à James Monroe, président en 1823, qui recentre l’action politique sur les affaires intérieures.

C’est la doctrine Monroe qui prévaut donc en 1914, lorsque le premier conflit mondial éclate. La doctrine stipule en effet que l’intervention américaine est exclue tant que les intérêts américains ne sont pas atteints.

#b) Le tournant de 1917

Woodrow Wilson suit les principes isolationnistes jusqu’à ce que des navires américains soient visés et détruits par les sous-marins allemands dans l’Atlantique, ceci ayant une incidence sur la prospérité du commerce américain et la liberté de navigation. De plus, un télégramme écrit par Zimmermann, en charge des affaires étrangères allemandes, proposant une alliance des Allemands avec les Mexicains, est intercepté par les Britanniques qui le confient aux États-Unis. Les principes isolationnistes ne peuvent plus tenir, et, le 6 avril 1917, l’intervention américaine est validée par le Sénat. Wilson appelle à faire une guerre « pour mettre un terme à toutes les guerres ».

Wilson se met par ailleurs à la rédaction des « 14 points », une proposition de paix selon les principes d’auto-détermination des peuples, de la liberté du commerce, de la transparence de la diplomatie, de coopération internationale en vue d’une sécurité collective garantie par une organisation de paix. Les « 14 points » sont soumis à la discussion aux conférences de Paris à partir de janvier 1919 et sont intégrés aux traités (Versailles, Neuilly, Trianon, Saint Germain et Sèvres).

La création de la Société des Nations est validée et celle-ci ouvre ses bureaux et son Assemblée à Genève. La politique interventionniste de Wilson est donc une initiative multilatérale en faveur de la coopération de tous les pays.

#c) Retour à l’isolationnisme

Cependant, le Sénat américain rejette le texte fondateur de la SDN, qui se trouve selon certains sénateurs (dont Borah) en contradiction avec la Constitution américaine. En effet, le principe de sécurité collective de la Charte menacerait la souveraineté américaine. Le Sénat rejette en bloc la SDN, mais aussi tous les traités de paix. Les États-Unis reviennent donc à l’isolationnisme et s’engagent dans des négociations bilatérales avec chaque état dans le but signer une multitude de traités de paix.

C’est un camouflet pour la politique internationale de Wilson, qui à son retour de Paris, fait une campagne médiocre et perd l’élection présidentielle. Dans le même temps, l’économie américaine connaît une croissance soutenue avec des innovations techniques. C’est l’âge d’or des Roaring Twenties, une prospérité reflétée par la Ford T, vendue à un prix abordable.

#d) Un isolationnisme partiel

L’isolationnisme américain des années 1920 n’est cependant que partiel. Les États-Unis sont, depuis la fin de la première guerre, la première puissance économique mondiale, conséquence directe du « suicide de l’Europe » mais aussi de l’essor des relations commerciales avec la Grande-Bretagne, pendant la guerre.

Les États-Unis, hors du cadre de la SDN, initient aussi des négociations diplomatiques pour réduire la taille de la marine japonaise, et signent un pacte pour rendre la guerre illégale en 1928. C’est le pacte Briand-Kellog de 1928, un accord de paix entre deux hommes qui sera ratifié par 63 pays.

Les intérêts économiques primant sur les initiatives politiques, les États-Unis mènent une « diplomatie du dollar ». Ils accordent ainsi des prêts à l’Allemagne par le plan Dawes en 1924 et le plan Young en 1929. L’Allemagne se trouvait en effet dans l’impossibilité d’assurer le paiement des réparations à la France et la Grande-Bretagne. Les États-Unis s’assurent ainsi du retour à la prospérité de l’Allemagne, potentiel partenaire commercial, mais aussi de la capacité de la France et de la Grande-Bretagne à pouvoir rembourser les dettes de guerre qu’elles avaient contractées auprès des États-Unis.

On le voit donc, dans une volonté de non-interventionnisme politique, les États-Unis parviennent toutefois à maintenir leur domination économique. La crise de 1929 marque un coup d’arrêt brutal, le plan Young est abandonné et les capitaux rapatriés. Roosevelt doit recentrer la politique américaine sur la « Nouvelle donne » (New Deal) délaissant les affaires étrangères pour redynamiser l’économie américaine.

#e) Retour à l’interventionnisme

Si les États-Unis maintiennent une position de neutralité en 1939 lorsque la seconde guerre mondiale éclate, Franklin Delano Roosevelt tient compte de l’opinion versatile à l’intérieur et des événements à l’extérieur. Progressivement, il engage les États-Unis dans un soutien aux démocraties occidentales. En 1939, la loi Cash and Carry permet aux États-Unis de vendre du matériel militaire aux pays amis si le transport est assuré par ceux-ci. En mars 1941, la loi Lend-Lease accorde des prêts aux pays amis pour financer l’achat de matériel militaire.

De plus, la Charte de l’Atlantique est élaborée en août 1941 avec Winston Churchill. Celle-ci reprend nombre de principes wilsoniens et préfigure les conditions et buts de l’intervention américaine dans le conflit mondial.

L’attaque de Pearl Harbour le 7 décembre 1941, par l’aviation japonaise, marque l’entrée en guerre des États-Unis. L’opinion est favorable à la guerre. La politique américaine est donc passée de l’isolationnisme à l’interventionnisme, puis à un internationalisme totalement assumé.

#B. Les États-Unis à la tête du monde libre

#a) Les architectes d’un nouvel ordre mondial

En 1945, les États-Unis victorieux s’imposent comme les architectes d’un monde nouveau qu’ils ont contribué à faire émerger. Sur le plan militaire, ayant lancé le Victory Program en janvier 1942, ils disposent en 1945 d’un arsenal considérable, et du monopole de l’arme nucléaire jusqu’en 1949.

Sur le plan diplomatique, Roosevelt a été l’artisan de l’ONU qui naît le 26 juin 1945 lors de la conférence de San Francisco. L’ONU siège à New York, nouveau centre de gravité politique du monde.

Sur le plan économique, les États-Unis n’ont pas connu de front sur leur territoire, ils disposent de 75% de l’or mondial et connaissent le plein emploi. Ils peuvent donc s’attacher à aider à la reconstruction des pays ruinés par la guerre. En 1944, la conférence de Bretton-Woods pose les fondements du développement économique mondial. Le dollar est la seule monnaie indexée sur l’or. Les idées libérales américaines triomphent avec la création du GATT(General Agreements on Tariffs and Trade) en 1947, en charge de la réglementation du commerce international.

#b) Tensions avec l’URSS

Cependant, il existe des tensions avec l’URSS. Premièrement, l’idéologie communiste n’est évidemment pas du tout compatible avec les principes libéraux des États-Unis. Les Soviétiques ne soutiennent ni la Banque Mondiale, ni le FMI.

La grande alliance de guerre se fissure petit à petit, notamment en juillet 1945, quand Truman s’impatiente sur le sort de la Pologne libérée par les Soviétiques et des futures élections libres promises par Staline. Par ailleurs, Truman est beaucoup plus méfiant à l’égard de Staline que Roosevelt ne l’était, et aussi beaucoup plus anti-communiste.

La méfiance s’intensifie lors du discours de Fulton, prononcé en mars 1946 par Winston Churchill. Il rend publique la mainmise des Soviétiques sur l’Europe centrale et orientale séparée de l’Europe de l’Ouest par un « rideau de fer » allant de la mer Baltique à l’Adriatique.

George Kennan, diplomate en poste à Moscou, documente les tensions en révélant la stratégie expansionniste soviétique et la guerre contre le capitalisme que Moscou entend mener dans le long télégramme du 22 février 1946. Les États-Unis, passés de puissance isolée à la position d’architecte d’un monde nouveau se heurtent à un redoutable contre-pouvoir.

#2. 1947-1991 : les États-Unis, superpuissance de la guerre froide

#A. Un bloc soudé autour des États-Unis

#a) Le tournant de 1947

La situation socio-économique désastreuse du continent européen pourrait favoriser l’arrivée au pouvoir des communistes. Truman, à l’aide Dean Acheson et de George Kennan, conçoit l’endiguement (containment) du communisme comme une priorité absolue.

La doctrine Truman, prononcée le 12 mars 1947, devant le Congrès américain, officialise l’inimitié entre les États-Unis et l’URSS. Elle présente le communisme comme le règne de l’oppression politique et du joug totalitaire, un péril qu’il faut absolument contenir dans ses frontières sous peine de contamination. Le combat contre le bloc de l’Est est donc impératif, et il est organisé par la superpuissance américaine.

#b) Organisation économique et diplomatique

Ainsi, le 5 juin 1947, un plan d’aide financière pour l’Europe est annoncé, le plan Marshall. L’influence sur l’Europe occidentale devient donc de plus en plus importante. Par ailleurs, la Yougoslavie de Tito, bien qu’étant un régime communiste, accepte également le plan Marshall, ce qui contribue à diviser le bloc de l’Est.

L’Organisation Européenne de Coopération Économique (OECE) est créée le 16 Avril 1948. L’organisation regroupe 18 pays et répartit les fonds du plan Marshall. L’organisation fait la promotion active du libéralisme économique et donc du modèle américain.

#c) Organisation militaire

Sur le plan militaire, la résolution Vandenberg de juin 1948 place des troupes américaines de façon permanente sur le continent européen.

Le Traité de l’Atlantique Nord, coalition de pays du bloc de l’Ouest, est signé en avril 1949. L’OTAN, en 1950, est la structure permanente du Traité. La superpuissance américaine organise donc son combat pour endiguer le communisme sur les plans économique, diplomatique mais aussi militaire.

#B. Le modèle nord-américain

#a) Modèle économique

La prospérité économique elle seule fait des États-Unis une puissance considérable. Ils possèdent deux tiers des réserves de l’or mondial et 50% de la richesse. La production est supérieure à tous les pays. Le dollar est roi.

Dans les années 1950 et 1960, le modèle économique américain favorise une consommation de masse avec l’apparition de nombreux nouveaux produits (électroménager, télévision, matières plastiques, nylon, etc.).

Les multinationales américaines contrôlent de larges pans de l’économie d’autres pays. L’influence commerciale a un aussi un impact sur l’évolution politique de ces pays (notamment en Amérique Latine).

#b) The American way of life

Le modèle américain est celui d’une société d’abondance, où le capitalisme fait la prospérité. L’augmentation du niveau de vie augmente considérablement. L’augmentation du nombre d’automobiles reflète la qualité de vie : 75% des ouvriers se rendent au travail en voiture.

Alors que l’Europe et l’Asie souffre occasionnellement de pénuries, les Américains jouissent de l’abondance, des maisons de banlieue équipées et des automobiles. Le style de vie est nouveau et fait changer les habitudes alimentaires. On consomme chewing-gums, Coca-Cola et hamburgers.

Les écrivains américains sont traduits dans le monde entier, de même que les films hollywoodiens sont diffusés. Ceux-ci tendent à célébrer le mode de vie américain. New York remplace Paris comme capitale mondiale de la culture. Le soft power américain séduit aussi les intellectuels, comme en attestent les lettres de Simone de Beauvoir lors d’un séjour à New York.

#C. Un déploiement global

#a) En Asie et au Proche-Orient

Les États-Unis sont présents dans le monde entier. En Asie, ils interviennent de 1950 à 1953 en Corée, sous le drapeau de l’ONU.

Pendant, la crise de Suez de 1956, ils font pression sur la France et la Grande Bretagne pour le retrait du canal.

Dans les années 1960, leur implication au Vietnam est croissante, jusqu’en 1973.

En 1972, ils se rapprochent même de la Chine communiste. Il s’agit alors pour la superpuissance de mener une politique réaliste en calculant l’équilibre des forces et l’intérêt national.

#b) En Europe

Le déploiement américain est aussi notable en Europe. Ils organisent, en effet, le pont aérien en 1948 lors du blocus de Berlin Ouest.

De même, les États-Unis réaffirment leur volonté de rester présents dans le lieu symbolique qu’est Berlin Ouest en juin 1963, où Kennedy déclare « Ich bin ein Berliner ».

Enfin, des missiles américains sont positionnés en Europe de l’Ouest, dans les pays membres de l’OTAN.

#c) En Amérique Latine

Après l’arrivée au pouvoir de Fidel Castro à Cuba, et le fiasco de l’opération américaine de la baie des cochons en avril 1961, les États-Unis créent une Alliance pour le progrès avec les pays d’Amérique Latine. Il s’agit d’une aide économique et militaire contre la menace de groupes révolutionnaires.

#d) Une multiplication des pactes

Les présidents Truman et Eisenhower se sont également lancés dans une série de pactes destinés à encercler les pays communistes. Il s’agit de l’ANZUS en 1951, avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande ; de l’OTASE(fn) en 1954 et du Pacte de Bagdad(fn) en 1955. À cette époque, on envisage les représailles massives, au risque d’utiliser de nouveau la force de frappe nucléaire.

#e) L’opinion américaine

Le déploiement de la force américaine se fait aussi sur l’opinion publique. Ainsi, une psychose anti-communiste voit le jour à la fin des années 1940. Joe McCarthy, sénateur de Wisconsin, dénonce l’infiltration d’agents communistes dans l’administration fédérale. Son action engendre une « peur rouge », une hystérie et une ambiance de chasse aux sorcières. Une enquête sénatoriale y met fin en 1954.

Ainsi, le modèle américain se déploie globalement, mêlant soft power et coalitions, préparant sa riposte massive contre l’unique ennemi : le communisme.

#D. La remise en cause du modèle (1960-1980)

#a) Contestation à l’intérieur du pays

Mais le modèle américain connaît des mouvements de contestation, notamment à l’intérieur du pays. En effet, le modèle social américain révèle ses limites. En 1962, 38 millions d’habitants vivent sous le seuil de pauvreté. Kennedy lancera un programme social, repris par Johnson. Mais à partir de 1965, le budget alloué à l’intervention au Vietnam empêche de régler les problèmes.

Les communautés noires luttent contre la ségrégation et provoquent des émeutes à Harlem, Los Angeles et Detroit. L’assassinat de Martin Luther King en 1968 radicalise certains groupes (Black Panthers, Malcolm X…).

La jeunesse s’élève aussi contre la guerre au Vietnam. En 1964, les jeunes protestent à Berkeley et accusent l’Université de produire des cadres du complexe militaro-industriel. En 1967, des jeunes défilent devant le Pentagone.

#b) Un contexte de crises

L’implication dans la guerre du Vietnam déséquilibre également la balance commerciale qui est négative en 1971 pour la première fois au XXe siècle. La croissance ralentit à cause de la désindustrialisation des grands secteurs. Le choc pétrolier renforce la crise en 1974. L’affaire du Watergate crée une crise politique sans précédent. Nixon démissionne en 1974.

#c) Contestation à l’extérieur du pays

En Europe, on s’inquiète de l’action américaine au Vietnam, les États-Unis semblent se replier sur eux-mêmes. En France, De Gaulle récuse la domination américaine et mène une politique qui n’est pas alignée. Il reconnaît donc officiellement la Chine communiste en 1964 et se rapproche des pays d’Europe de l’Est. En 1966, il retire la France des opérations militaires de l’OTAN et prononce le discours de Phnom Penh, critiquant violemment l’intervention américaine au Vietnam.

En Amérique Latine, l’Alliance pour le progrès est un échec. Des guérillas inspirées par Che Guevara se multiplient. Carter ayant abandonné le soutien aux dictatures, des révolutions éclatent notamment en Amérique Centrale.

En Iran, la théocratie de l’ayatollah Khomeiny s’impose et s’érige en contre-pouvoir, il s’agit d’une révolution islamique qui dénonce le modèle américain.

En Afrique, des troupes cubaines et soviétiques placent des alliés au pouvoir en Angola et au Mozambique. Le modèle américain est mis à mal à l’intérieur du pays comme à l’extérieur où l’impérialisme américain est dénoncé.

#D. Réaffirmation du modèle américain (1980-1991)

#a) La reprise économique

Cependant, la reprise économique sous la présidence de Reagan est réelle et elle réaffirme la puissance du modèle américain. Malgré les coupes sur l’État-Providence, le chômage diminue.

#b) La lutte contre « L’Empire du mal »

Reagan est également un virulent anti-communiste. Il qualifie l’URSS « d’Empire du mal » et lance des contre-guérillas en Amérique Latine (Contras au Nicaragua) et en Afrique.

Il déploie aussi des nouveaux missiles Pershing et lance le programme « guerre des étoiles », bouclier contre les missiles russes.

Malgré cette réaffirmation belliqueuse, en 1986, il engage aussi les États-Unis dans des accords de non-prolifération d’armements nucléaires avec l’URSS.

Georges Bush est élu en 1988 et sera le dernier président de la guerre froide. Les États-Unis sont une superpuissance, dont le modèle est contesté, mais une superpuissance victorieuse d’un combat sur tous les fronts lorsque le bloc de l’Est s’effondre en 1989, puis l’URSS en 1991.

#3. La puissance américaine depuis 1991

#A. Retour à l’hégémonie : une hyperpuissance

#a) Puissance économique

Les États-Unis sont alors qualifiés d’hyperpuissance à partir de 1991. Ils produisent le quart du PIB mondial, ont la première agriculture du monde et une industrie de pointe. Le brain drain leur permet d’obtenir la main d’œuvre la plus experte. Ils sont aussi une puissance commerciale et financière, le dollar étant toujours roi dans les échanges mondiaux.

Le soft power américain est tout puissant, répandant idées, valeurs et modes de vie américains sur tous les continents.

#b) Le gendarme du monde

Les États-Unis sont aussi le gendarme du monde. Ils sont la puissance militaire dominante en raison de leur arsenal militaire et de la dissémination de leurs bases sur la surface de la terre.

Ils disposent d’un siège permanent au conseil de sécurité de l’ONU et l’OTAN s’est élargie à de nombreux pays de l’ancien bloc de l’Est.

Ils ont le pouvoir d’influencer s’ils considèrent que leurs intérêts sont menacés, comme pendant la première guerre du Golfe en 1990-1991, et se servent de l’OTAN pour imposer la paix selon leurs termes (accords de Dayton en 1995 entre Serbie, Croatie et Bosnie).

Bill Clinton mène une politique d’enlargement, expansion du pouvoir par le soft power et les accords commerciaux. Ainsi, l’ALENA est formé en 1995 et la Chine intègre l’OMC en 2001.

#B. Le nouvel « Axe du mal »

#a) Le 11 Septembre 2001

le 11 Septembre 2001 est un tournant dans l’histoire des relations internationales. Le spectaculaire attentant, entraînant la mort de 2995 personnes, est perpétré par Al-Qaida sur le sol américain. L’attentat entraîne un bouleversement dans la politique américaine. La lutte contre le terrorisme devient la priorité absolue de l’administration Bush et des suivantes.

#b) Les conséquences du 11 Septembre

La riposte immédiate est donc l’invasion de l’Afghanistan, mettant fin au régime taliban au pouvoir depuis 1994. George W. Bush utilise l’expression « Axe du Mal » pour désigner les pays suspectés de soutenir le terrorisme.

Le multilatéralisme est donc remplacé par l’unilatéralisme, actions initiées par les États-Unis seuls. Une fois encore la stratégie interventionniste est modifiée, même sans soutien de l’ONU, les États-Unis interviennent contre les « états voyous ». La seconde cible des États-Unis est l’Irak de Saddam Hussein.

#c) Une puissance sur la défensive

Dès 2002, Donald Rumsfeld, secrétaire de la défense, donne le feu vert à des opérations de la CIA à l’étranger et à l’intérieur, le Patriot Act permet de faciliter la détention de personnes soupçonnées de projeter des actions terroristes. Guantanamo est le symbole de cette riposte qui contourne potentiellement les droits de l’homme.

#C. La présidence Obama : une politique post-impériale

#a) La méthode Obama, une nouvelle diplomatie

Obama rompt cependant avec les méthodes précédentes et obtient d’ailleurs le Prix Nobel de la Paix en 2009. Il entend mener une guerre ciblée, non pas contre « le mal », au risque d’aller à l’encontre de la perception messianique de la présidence américaine, mais contre le terrorisme, une guerre limitée centrée sur des réseaux précis (Al-Qaida au Maghreb et dans la péninsule arabique).

La traque et la mort de Ben Laden, le 1er mai 2011, au Pakistan, soit près de dix ans après l’attentat de 2001, est le symbole fort de cette nouvelle politique.

#b) La réorganisation du déploiement de la puissance

Dans un contexte de crise économique, le budget de la Défense est réduit de 10%, représentant 450 milliards dollars sur 10 ans. Priorité est donnée aux problèmes intérieurs : chômage, réforme de la couverture sociale et questions environnementales.

Les États-Unis ne se retirent cependant pas tout à fait ni ne se replient : la possibilité d’intervention existe si les intérêts économiques et politiques sont menacés. Les États-Unis sont par exemple fournisseurs de ressources à l’OTAN pour l’intervention en Libye en 2011, mais ne sont pas en première ligne.

#c) Un nouveau monde politique multipolaire

Un nouveau monde politique émerge autour des pôles de la mondialisation. C’est un monde multipolaire et l’essor du G20 en atteste. Le journaliste Fareed Zakaria illustre cette idée en parlant de « rise of the rest », l’essor du reste du monde, après l’essor des États-Unis et des pays occidentaux.

#Conclusion

Les États-Unis, isolationnistes par tradition, ont évolué vers une politique interventionniste et le multilatéralisme au cours des conflits mondiaux. La volonté d’un retour à la tradition isolationniste leur a permis pendant l’entre-deux-guerres de se recentrer sur le dynamisme et la prospérité de leur économie. Les États-Unis ont donc consolidé une puissance colossale.

Cette puissance colossale leur a permis d’organiser, structurer et contrôler un monde capitaliste occidental façonné à leur image pendant la guerre froide, contre le « péril rouge » que représentait le bloc communiste qu’il fallait endiguer. Mais leur modèle a connu des contestations et leur omniprésence a généré du ressentiment et de la résistance de la part d’individus, de groupes et d’états.

Si les États-Unis deviennent une hyperpuissance en 1991, lors de l’effondrement de l’URSS, c’est une hyperpuissance sur la défensive depuis 2001, attaquée sur son territoire, tentée par les actions unilatérales. Les méthodes d’Obama semblent cependant renouer avec le multilatéralisme.

L’émergence de nouvelles puissances mondiales vient complexifier les équilibres car celles-ci n’entendent pas se plier à la domination américaine.